SOCIAL TRAITRE N°1
Mai 2008: Naissance d'un fanzine satirico-poétique.

Ce premier numéro de Social Traitre paraît au format papier au début du joli mois de Mai 2008 avec le sous titre "le fanzine qui travaille le social". Distibué gratuitement dans les coordinations et manifestations liées au mouvement des étudiants en travail social "pour/contre/oui mais " la gratification des stages. Le but avoué des rédacteurs est l'agitation politique. Le ton est satirique.

Editorial

Sauvegarde de la formation! Sauvegarde du métier! Sauvegarde du travail social!

Messieurs les politiques, laissez nous faire notre métier, laissez nous être et devenir des travailleurs sociaux, afin de continuer à tenir à respect les hordes de loosers qui, à nos portes raclent et grognent, réclament la part du gâteau qu'ils n'ont pas su saisir. Tenez le vous pour dît. Nous vous sommes indispensables. Comment ferez vous sans nous, héros des temps modernes, sacrifiés volontaires et salariés dans l'arène économique, comment ferez vous sans nous pour répartir les miettes budgétisées, pour maintenir le culte de l'impuissance et la soumission à l'ordre naturel du marché et de l'égalité des chances? Messieurs les politiques, camarades, vous avez besoin de nous! Donnez nous les moyens d'exister, à votre service, s'il vous plaît, nous ne déméritons pas au courage de nos aînés et sauront donner aux pauvres les moyens de s'adapter au système, évitant ainsi qu'ils le remettent en cause. Messieurs les politiques, donnez nous satisfaction: de l'argent et de la reconnaissance. Et nous continuerons ensemble, main dans la main, à tenir à distance la misère du jardin d'Eden. Tout ce que nous revendiquons, c'est une place dans le jardin, une solde de soldat au service de l'ordre social, un peu d'amour et un sourire complice. Messieurs les politiques, le travail social vous est acquis, dans la guerre qui s'annonce nous avons choisi notre camp. Nous sommes avec vous, vous êtes avec nous, ensemble pour un travail social de qualité et un ordre social assuré!Reprenons en cœur, la main sur le ventre, vive le travail social!

TEST: Quel travailleur social êtes-vous?

Répondez aux questions, compter vos A, vos B et vos C et reportez vous aux résultats du test pour découvrir enfin la vérité sur votre identité professionnelle!

Qu'est ce que le travail social?
□ A: Une vocation
□ B: Un salaire
□ C: Une soupape de sécurité

Qu'est ce qu'un travailleur social?
□ A: Quelqu'un de bien, forcément
□ B: Un salarié parmi tant d'autre
□ C: Un agent de l'ordre social

Votre livre de chevet?
□ A: « J'aime les pauvres, ils sont gentils » de l'abbé Pierre
□ B: « Les pauvres ça coûte pas cher et ça peut rapporter gros » de Martin Hirsh
□ C: « Punir les pauvres » de Loic Wacquant

L'inégalité sociale selon vous?
□ A: C'est comme ça
□ B: C'est pas de chance
□ C: C'est pas juste

Qu'est ce qu'un travail social efficace?
□ A: Un travailleur social fier de lui
□ B: Un travail bien payé
□ C: Une activité silencieuse

Vous avez le plus de A:
Vous êtes un travailleur social heureux. Vous avez su mettre à profit la réalité de notre société pour vous construire une identité de héros. Vous êtes beau et généreux, vous nagez dans la merde avec une facilité déconcertante.

Vous avez le plus de B:
Vous êtes un travailleur social intelligent. Vous avez vite compris de quel côté de la barrière il fallait se placer pour ne pas avoir à découper des carcasses de cochons à l'usine. Vous aurez certainement le droit de vous endettez pour acheter la maison de vos rêves.

Vous avez le plus de C:
Vous êtes un travailleur social consciencieux. Vous trouvez que la société est dégueulasse et vous faîtes ce que vous pouvez avec les bâtons merdeux qu'on vous donne. Vous ne ménagez pas vos efforts. Ah, si seulement les pauvres pouvaient eux aussi faire un effort...

"Cette situation est intolérable!" En exclusivité, un entretien avec Milton Friedman

Milton friedman est un économiste américain né le 31 juillet 1912 à New York et décédé le 16 novembre 2006 à San Fransisco, ardent défenseur du libéralisme, considéré comme l'un des économistes les plus influents du Xxeme siècle, il est l'auteur entre autres de "Capitalisme et liberté". Il a accepté de répondre aux questions de Social Traitre.

Social Traitre: Monsieur Milton Friedman, tout d'abord merci de répondre à notre invitation à témoigner.

Milton Friedman: Mais c'est tout à fait normal d'apporter mon soutien à une cause juste dans une société juste.

ST: Le travail social est en danger. Les étudiants n'ont plus les moyens de se former. Selon vous que serait la société sans ses travailleurs sociaux?

MF: Cette situation est intolérable. Le travail social est indispensable aux politiques de modernisation de la société. Les travailleurs sociaux ont la responsabilité d'en accompagner les nécessaires réformes. Comment feront nous accepter le recul de l'état à divers endroits, santé et protection sociale, code du travail, éducation nationale, sans la vigilance des travailleurs sociaux qui posent par leur action la responsabilité individuelle des individus comme cause première de leur état? Le travail social est garant de l'ordre social car il permet l'adaptation au détriment de la contestation. Le travail social est le meilleur rempart contre l'insurrection. La meilleure garantie d'une gestion saine de l'exclusion, dont sont seuls responsables les individus perdants, si vous me permettez l'expression. C'est pourquoi je pense que la recherche du profit doit s'accompagner d'un travail social maitrisé et concerté.

ST: Quel doit être selon vous l'action du travail social en direction des publics fragilisés?

MF: L'action doit prendre la forme de projets individualisés, car c'est bien la responsabilité des individus qui est en cause, et il ne reste que les gauchistes nostalgiques à l'idéologie confuse pour invoquer de prétendues excuses sociologiques ou environnementales. Il faut faire du cas par cas avec des individus en somme coupables de leur état et de leur condition sociale. Le travailleur social doit être en capacité de faire prendre conscience de sa responsabilité indivisible à l'exclu et empêcher ainsi que l'assisté ne soit dans la position de faire porter à l'organisation sociale le poids de son échec. L'égalité des chances est un fait indiscutable, et la société n'a pas à s'accuser de la situation des fainéants, des malchanceux et des parasites. Elle doit par contre les insérer, c'est à dire leur faire prendre conscience qu'ils sont seuls responsables de leur non réussite, et intégrer leur parcours de perdants dans la logique du système auquel ils appartiennent. C'est là la tâche du travail social. Non pas donner à chacun des conditions de vie égales mais expliquer pédagogiquement aux exclus comment leurs choix les ont amenés là. Ce travail à un coût, qui est celui de la paix sociale.

ST: Mais n'y a t'il pas un minimum à offrir aux perdants du système?

MF: Tout à fait. Et ce minimum c'est le travail social. Le coût du travail social doit ainsi être calculé en fonction du bénéfice attendu, ici la paix sociale. Un gouvernement responsable sera donc attentif à permettre la perpétuation du travail social pour tenir à distance la contestation paranoïaque d'un système de sélection légitime et naturel. Ainsi, le travail social est une charge dans une société productrice de richesses, mais c'est une charge qui ne doit pas être négligée.

ST: Mais justement les parcours de formation des étudiants en travail social sont bloqués. Cela menace t'il l'ordre social?

MF: Tout à fait. Il est de la responsabilité du gouvernement de permettre le renouvellement des forces vives au service du contrôle social. La situation doit être débloquée au plus vite. Mais c'est aussi l'occasion de remettre un peu de sens dans cette formation. Et qu'est ce qui fait sens dans une formation de travailleur social? C'est sa présence effective au contact des usagers et la plus value qu'il apporte par sa présence à la structure qui l'accepte en stage. Le temps passé sur les bancs de l'école est un temps important mais non productif. Il s'agit donc de récompenser uniquement l'acte professionnel en en instaurant la gratification. De plus, cette gratification est un mode de gestion rationnel de l'action sociale car elle permet de réduire les coûts salariaux dans l'entreprise à vocation sociale. Ceci car elle prend en compte les besoins de personnels dans la structure et y répond en permettant la présence de stagiaires qui placés en situation de responsabilité assument un rôle éducatif sans prétendre à un salaire de professionnel diplômé. Et c'est bien en forgeant qu'on devient forgeron. Le stagiaire est forcé d'apprendre, la structure dispose d'un personnel suffisant, les coûts salariaux baissent et tout le monde est content.

ST: Merci Monsieur Milton Friedman

MF: De rien et bon courage. Ne lâchez rien.
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